Selon une étude menée par OpinionWay pour Malakoff Humanis en 2020, 60 % des salariés français se disent touchés par la charge mentale au travail. Cette problématique préoccupe de plus en plus les employés, les managers et les services de santé.

Lors d'un groupe de travail que j’ai animé au sein d'une grande entreprise, les participants ont échangé sur les effets de la charge mentale sur leur quotidien. Parmi les points abordés, on retrouve le sentiment de malaise, la perte de contrôle, la baisse de motivation et de performance, et même une augmentation de l’absentéisme.

Au travers de cette thématique, je souhaite vous proposer des clés de lecture pour comprendre cette problématique. Nous allons mettre en lumière les conséquences de la charge mentale, aussi bien pour les individus que pour les équipes. Les témoignages recueillis lors de cette réunion informelle montrent qu'il est essentiel de trouver des solutions pour prévenir et diminuer la charge mentale, afin d'améliorer notre bien-être et notre efficacité au travail.

Dans cet article, nous nous inspirerons des expériences et des ressentis des participants à cette réunion, ainsi que des ouvrages de référence, pour explorer des méthodes permettant d'identifier et de prévenir les situations de surcharge mentale. Nous partagerons également des astuces pour mieux gérer notre temps et nos priorités, dans le but de mieux vivre la charge mentale au travail et d'améliorer notre qualité de vie en entreprise.

Charge mentale, de quoi parle-t-on ?

La charge mentale est un concept complexe qui englobe de nombreux aspects du travail, comme l'adaptation aux situations, la gestion des contraintes temporelles, l'organisation du travail, la priorisation des tâches et la capacité de traitement des informations. 

Voici le témoignage d’une salariée avec laquelle j’ai pu échanger sur ce sujet :

«  Ces derniers mois, j'ai ressenti une augmentation de la charge mentale au travail, principalement à cause d'une surabondance d'informations et de pressions diverses. 

Je dois constamment jongler entre les e-mails, les réunions et les appels, tout en essayant de répondre aux attentes de mes supérieurs et de mes collègues. 

La situation est d'autant plus difficile avec les injonctions contradictoires et la multiplicité des donneurs d'ordre, qui compliquent la communication et la coordination entre les différents services.

Les changements fréquents de procédures et de méthodes de travail sont aussi une source de stress pour moi. M'adapter rapidement à ces modifications, sans un soutien et une formation adéquats, augmente ma charge mentale. Cela a des répercussions sur ma vie professionnelle et personnelle.

J'espère que mon entreprise pourra prendre en compte ces problématiques et mettre en place des solutions pour alléger la charge mentale des salariés. Mon témoignage, je l'espère, permettra de sensibiliser les dirigeants aux défis que nous rencontrons quotidiennement. » 

Je remarque que la charge mentale est souvent exacerbée par des facteurs tels que la surabondance d'informations, les pressions diverses, les injonctions contradictoires, la multiplicité des donneurs d'ordre et les changements fréquents de procédures.

Si l’on doit donner une définition simple et compréhensible par toutes et tous, je dirai que la charge mentale au travail représente toutes les demandes mentales et émotionnelles auxquelles les employés font face en accomplissant leurs missions. Elle découle de l'empilement des tâches, responsabilités, contraintes de temps et informations à gérer.

Voici quelques exemples concrets : 

• Je dois analyser et répondre à des dizaines d'e-mails chaque jour, en priorisant les plus urgents.
• Je participe à plusieurs réunions et appels téléphoniques, devant m'exprimer clairement et défendre mes idées.
• Je gère des projets complexes avec des deadlines serrées, nécessitant une planification et un suivi rigoureux.
• Je collabore avec des collègues aux compétences variées, m'adaptant à leurs besoins et leurs personnalités.
• Je traite des situations conflictuelles ou émotionnellement chargées, devant rester calme et diplomate.
• Je prends des décisions importantes qui peuvent impacter l'entreprise, en pesant les avantages et les risques.
• Je fais face à des imprévus et des changements, m'obligeant à réévaluer mes priorités et à m'adapter rapidement.

Quels sont les signaux faibles d’une charge mentale élevée ?

Il est important d'être attentif aux signaux d'alerte qui peuvent indiquer une surcharge mentale. Chez soi et chez les autres, voici quelques signes à surveiller :

1. Fatigue et épuisement
2. Souffrance et détresse émotionnelle
3. Manque de disponibilité et d'écoute
4. Isolement social et irritabilité
5. Difficultés de concentration et erreurs fréquentes
6. Troubles du sommeil et de l’humeur

Je travaille régulièrement avec des dirigeants qui prennent conscience de la difficultés de leurs équipes et qui souhaitent trouver des solutions. C’est une réflexion que nous avons pu mener avec Stéphane, dirigeant d’une PME :

« Au fil des ans, j'ai pu observer les effets de la charge mentale sur mes collaborateurs à travers des situations concrètes de leur travail quotidien. Les manifestations sont multiples et variées, mais toutes témoignent des difficultés qu'ils rencontrent pour gérer cette charge.

Par exemple, j'ai remarqué que certains employés, submergés par les tâches à accomplir et les délais serrés, se plaignaient souvent de fatigue et d'épuisement. D'autres exprimaient leur souffrance et leur détresse émotionnelle lorsqu'ils devaient gérer des clients mécontents ou des situations conflictuelles avec des collègues.

Dans le même temps, il m'est apparu que le manque de disponibilité et d'écoute était également un signe de charge mentale élevée. J'ai pu constater cela lorsque des collaborateurs, débordés par leurs responsabilités, ne parvenaient plus à se rendre disponibles pour leurs collègues ou à être à l'écoute de leurs besoins. De même, l'isolement social et l'irritabilité de certains collaborateurs, souvent causés par la pression et les tensions liées à leur travail, sont des indicateurs d'une charge mentale importante. »

En tant que dirigeant, ces manifestations peuvent nous interpeller et nous faire prendre conscience de l'importance de prendre en compte la charge mentale dans la gestion des ressources humaines et la prévention des risques psychosociaux. Il est essentiel de mettre en place des mesures pour soutenir nos collaborateurs et alléger leur charge mentale, afin d'améliorer leur bien-être et leur efficacité au travail.

Je suis convaincue qu'en prêtant attention à ces signes et en agissant de manière proactive, nous pourrons créer un environnement de travail plus sain et plus épanouissant pour tous.

Quels sont les impacts de cette charge mentale sur notre santé ?

L'impact de la charge mentale sur notre corps au niveau biologique peut être expliqué de manière simple en imaginant notre cerveau comme un superordinateur et notre corps comme une machine complexe qui fonctionne en synergie.

Lorsque nous faisons face à une charge mentale importante, notre cerveau doit traiter une grande quantité d'informations et gérer plusieurs tâches simultanément. Cela peut se comparer à un ordinateur dont la mémoire est surchargée et qui a du mal à faire fonctionner tous les programmes en même temps.

Dans cette situation, notre cerveau libère des hormones de stress, comme le cortisol, pour nous aider à faire face à ces défis. Ces hormones ont pour effet de mobiliser nos ressources et notre énergie pour nous permettre de nous concentrer sur les tâches importantes. Cependant, si cette situation perdure et que notre cerveau est constamment sollicité, ces hormones de stress peuvent devenir néfastes pour notre corps.

En effet, un taux élevé de cortisol sur une longue période peut avoir des effets négatifs sur notre corps, comme un affaiblissement du système immunitaire, des troubles du sommeil, une prise de poids, des problèmes de digestion, une augmentation de la tension artérielle et des problèmes cardiovasculaires.

De plus, notre cerveau a besoin de périodes de repos pour se régénérer et fonctionner correctement. Lorsque nous sommes constamment soumis à une charge mentale élevée, notre cerveau n'a pas l'occasion de se reposer et de récupérer, ce qui peut mener à un épuisement mental et émotionnel.

La charge mentale peut avoir des conséquences néfastes sur la performance et le bien-être des collaborateurs, comme l'ont souligné les différentes personnes qui j’ai rencontré :

1. Sentiment de mal-être général
2. Perte de maîtrise et de contrôle
3. Détérioration du bien-être et baisse de performance
4. Diminution de la motivation
5. Difficulté à se concentrer
6. Augmentation de l'absentéisme
7. Épuisement physique et mental
8. Fatigue persistante
9. Réduction de la performance individuelle et collective
10. Perte de confiance en soi
11. Isolement social
12. Détérioration des relations interpersonnelles

Les conséquences de la charge mentale sont bien réelles et nous touchent aussi bien sur le plan personnel que dans nos interactions avec nos collègues. Il est crucial de prendre des mesures pour limiter la charge mentale et ainsi favoriser un meilleur équilibre et une meilleure efficacité au travail.

L'importance d'un dialogue ouvert et bienveillant entre collègues et managers

Le mode de management a un impact considérable sur la charge mentale des collaborateurs. Un manager attentif et bienveillant peut aider à prévenir et à réduire la surcharge mentale en mettant en place certaines actions. 

Je vous propose d’approfondir quelques les conseils pour instaurer un climat de confiance et alléger la charge mentale :

1. Organiser des réunions régulières pour discuter des enjeux liés à la charge mentale et des moyens de l'alléger : il est possible de planifier des moments dédiés à ces discussions, où chacun peut partager ses préoccupations et ses idées pour améliorer le quotidien au travail. Cela permet également d'identifier les situations problématiques et de réagir rapidement.
2. Encourager les collaborateurs à exprimer leurs ressentis et leurs besoins : Un manager doit créer un environnement de travail où les collaborateurs se sentent à l'aise pour exprimer leurs émotions et besoins. Cela peut passer par la mise en place de moments informels d'échange, de boîtes à idées ou de groupes de travail dédiés.
3. Éviter le jugement et adopter une attitude d'écoute active et empathique : Le manager peut montrer qu'il comprend et prend en compte les préoccupations de ses collaborateurs. Il est préférable de mettre de côté ses propres opinions et de se mettre à la place de l'autre pour mieux comprendre sa situation. Cela passe par une écoute attentive, sans interruption, et par la reformulation des propos pour s'assurer d'avoir bien compris.
4. Travailler ensemble pour trouver des solutions adaptées à chaque situation : Le manager peut impliquer les collaborateurs dans la recherche de solutions pour alléger la charge mentale. Cela peut inclure la réorganisation des tâches, la mise en place de formations pour améliorer les compétences, la création d'espaces de détente ou encore l'adoption de politiques de flexibilité au travail.

Et concrètement, ça donne quoi ?

Je vous propose ici 3 façons d’aborder le sujet, ensuite c’est à vous de vous l’approprier et de trouver vos propres mots, ceux qui viendront de façon naturel et authentique :

Exemple 1 - Discours empathique :

« J'ai remarqué que tu semblais un peu débordé(e) ces derniers temps, et je veux m'assurer que tu te sentes soutenu(e) dans ton travail. La charge mentale peut peser sur chacun d'entre nous différemment. J'aimerais prendre un moment pour discuter avec toi de tes ressentis et des éventuelles difficultés que tu pourrais rencontrer. N'hésite pas à partager tes préoccupations avec moi, ensemble, nous pourrons trouver des solutions pour t'aider à mieux gérer ta charge de travail. »

Exemple 2 - Discours axé sur la collaboration :

« J'ai constaté que notre équipe fait face à un certain nombre de défis et je suis conscient que cela peut engendrer une charge mentale importante pour chacun d'entre nous. Je propose que nous organisions une réunion avec l'ensemble de l'équipe pour discuter ensemble des difficultés rencontrées et des pistes d'amélioration. Ton avis est précieux et je suis convaincu que si nous travaillons ensemble, nous pourrons trouver des solutions pour alléger la charge mentale de tous. »

Exemple 3 - Discours axé sur le développement professionnel :

« J'apprécie beaucoup ton travail et je souhaite m'assurer que tu te sentes épanoui(e) et à l'aise dans ton rôle. La charge mentale peut parfois entraver notre progression professionnelle et notre bien-être. J'aimerais discuter avec toi de tes besoins en matière de formation, de ressources ou d'aménagement du temps de travail pour t'aider à mieux gérer la charge mentale et à continuer à te développer professionnellement. N'hésite pas à me faire part de tes idées et de tes attentes lors de notre prochaine rencontre. »

Prévenir la surcharge mentale grâce à une meilleure gestion du temps et des priorités

La gestion du temps et des priorités est un élément clé pour prévenir la surcharge mentale. Une méthode connue pour cela est la méthode GTD (Getting Things Done) de David Allen. Cette méthode repose sur 5 étapes :

• Collecter : noter toutes les tâches à faire, petites ou grandes, dans un système de collecte unique.
• Traiter : décider de la prochaine action à effectuer pour chaque tâche, en fonction de sa priorité et de son niveau d’urgence.
• Organiser : classer les tâches par contexte, c'est-à-dire le lieu ou le moment où elles doivent être effectuées (bureau, téléphone, ordinateur, à la maison, etc.).
• Réviser : revoir régulièrement sa liste de tâches et mettre à jour ses priorités en fonction de l'évolution de la situation.
• Agir : passer à l'action et effectuer les tâches planifiées.

La méthode GTD permet de libérer de l'espace mental en évitant la surcharge d'informations et de tâches à traiter. Elle permet également d'améliorer l'efficacité et la productivité en étant plus organisé et en ayant une vision claire des priorités.

Comment peut-on appliquer cette méthode ?

Voici un exemple concret d'outil simple pour appliquer la méthode GTD :

1. Créez une liste des tâches à accomplir : écrivez toutes les tâches qui vous viennent à l'esprit, grandes ou petites, sur une liste papier ou numérique.
2. Déterminez l'action à réaliser : pour chaque tâche, déterminez l'action concrète à réaliser pour la compléter. Par exemple, si la tâche est "organiser une réunion d'équipe", l'action à réaliser pourrait être "envoyer un e-mail aux membres de l'équipe pour fixer une date".
3. Classez les tâches par contexte : une fois que vous avez identifié toutes les actions à réaliser, classez-les par contexte. Par exemple, regroupez les tâches à réaliser sur l'ordinateur, celles à réaliser au téléphone, celles à réaliser lors d'une réunion, etc.
4. Planifiez les actions : en fonction de vos priorités et de vos contraintes de temps, planifiez les actions à réaliser dans votre emploi du temps.
5. Révisez régulièrement votre liste : régulièrement, mettez à jour votre liste de tâches et vérifiez que toutes les actions ont été réalisées.

Cet outil simple permet d'appliquer concrètement la méthode GTD en suivant les principes clés de la méthode : identifier toutes les tâches à réaliser, déterminer l'action concrète pour chaque tâche, classer les tâches par contexte, planifier les actions et réviser régulièrement la liste des tâches.

C’est une méthode, il en existe d’autres. Et puis, soyons honnête, lorsque l'on est déjà submergé de travail, mettre en place une méthode supplémentaire peut être difficile à gérer. Dans ce cas, il peut être plus judicieux de prendre le temps de faire une pause pour analyser sa charge mentale et identifier les tâches prioritaires.

L’idée est de se poser les bonnes questions pour hiérarchiser les tâches et identifier celles qui sont les plus importantes. Par exemple, demandez-vous :

• Quelles sont les tâches qui doivent absolument être réalisées aujourd'hui ?
• Quelles sont celles qui peuvent être reportées à plus tard ?
• Y a-t-il des tâches qui peuvent être déléguées à un collègue ou sous-traitées à un prestataire ?

En prenant le temps de faire cette analyse, vous pouvez mieux cibler vos efforts et vous concentrer sur les tâches les plus importantes, ce qui vous permettra de réduire votre charge mentale et de mieux gérer votre temps.

Et quand on est dirigeant, on fait comment ?

En complément de cette méthode, les startuppers de "La 25e heure" proposent également des conseils pour améliorer sa productivité et mieux gérer son temps. Parmi ces conseils, on peut citer :

1. Fixer des objectifs clairs et réalisables : définir des objectifs précis pour savoir où l'on veut aller et éviter de se perdre dans les tâches à réaliser.
2. Prioriser les tâches et déléguer : savoir distinguer les tâches importantes des tâches secondaires, et de déléguer celles qui peuvent être confiées à d'autres personnes.
3. Organiser son temps de travail et ses pauses : planifier son temps de travail en fonction des priorités et de prendre des pauses régulières pour se reposer et se ressourcer.

C’est l’heure de conclure. La charge mentale est un sujet crucial dans notre vie professionnelle, et il est important de la prendre en compte pour préserver notre bien-être et notre performance. Nous avons tous déjà été confrontés à des situations de surcharge mentale, et il est important de savoir les identifier pour mieux les gérer. Que vous soyez dirigeant, manager ou employé, il est primordial de mettre en place un dialogue ouvert et bienveillant pour favoriser un climat de confiance et mieux comprendre les besoins de chacun.

Même si la méthode GTD peut être très utile pour mieux gérer son temps et ses priorités, il est important de trouver celle qui convient le mieux à chacun, sans se rajouter de la charge mentale supplémentaire. Parfois, de simples astuces comme la respiration ou la déconnexion régulière peuvent faire toute la différence.

Enfin, il est essentiel de rappeler que chacun a le droit à un équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle. Il n'y a pas de honte à prendre du temps pour soi et pour sa famille, et cela peut même être bénéfique pour sa productivité au travail. Alors n'hésitez pas à poser vos limites et à mettre en place les bonnes pratiques pour préserver votre bien-être et celui de vos collaborateurs.

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